Ça y est c’est le moment, le grand de la crèche, celui qui a 3 ans ou presque, va partir pour l’école, nouvelle institution dans laquelle il va étrangement redevenir un petit ! Mais cette fois il sera un élève ou devra apprendre à le devenir. Pour l’enfant c’est un véritable changement. Il va devoir s’adapter à un nouvel environnement, à de nouvelles personnes et à de nouveaux rythmes de vie, avec à la clé des apprentissages à faire, plus structurés et plus codifiés que ceux qu’il a pu expérimenter à la crèche.

Comment devient-on un élève ?

Mais comment devient-on un élève ? Ne suffit-il pas d’aller à l’école pour l’être ? En fait, le plus souvent, l’école associe le fait de devenir un élève à un comportement spécifique de l’enfant. Il devient plus autonome, plus attentif, plus obéissant ou tout simplement plus calme. Ce qui correspond au développement normal de tout enfant qui sort de sa période de « bébé » pour entrer dans celle du jeune enfant. Il est alors capable de rester un peu plus longtemps en place et donc assis sur une chaise, écoutant le professeur donner des indications ou raconter des histoires. Il peut s’habiller et se déshabiller seul pour aller aux toilettes ou mettre son manteau. Il peut attendre son tour pour prendre la parole ou faire une activité. Il utilise le langage pour se faire comprendre et engager la conversation avec les autres enfants, créant ainsi des amitiés. Il comprend qu’il n’est plus le centre du monde mais en fait partie. Grandir suffit donc pour être équipé pour l’école et tous les enfants deviennent des élèves en y allant.

Faut-il que l’enfant soit propre ?

La grande angoisse des parents quant au départ de leur enfant à l’école concerne souvent la propreté. Or, d’une part aucun texte n’indique que l’enfant ne doit plus avoir de couches pour fréquenter l’école, et d’autre part le contrôle des sphincters n’est en rien un critère permettant d’évaluer que l’enfant est prêt à faire les apprentissages prévus par l’école. Il s’agit là d’une convention de fonctionnement de l’école pour éviter aux agents territoriaux d’avoir trop de travail en ayant des couches à changer ! Pour autant, un enfant de trois ans est le plus souvent en capacité de se contrôler, même si cela est tout récent pour lui et qu’il a encore des petits accidents qui devraient être parfaitement tolérés à l’école. L’important est ici non seulement de ne mettre aucune pression à l’enfant et aussi de ne pas lier le fait de ne plus mettre de couches à la possibilité d’aller à l’école. En effet, en devenant un enjeu de départ de la crèche pour l’école, l’acquisition de la propreté risque de devenir pour l’enfant un moyen de s’opposer ou entraîner chez lui des angoisses. Le contrôle des sphincters correspond à un développement naturel de tous les jeunes enfants, qui a lieu autour des trois ans, lorsqu’ils deviennent capables physiquement, et qu’ils comprennent ce que l’on attend d’eux culturellement, en toute simplicité et sans enjeux. Il n’est pas rare que certains enfants arrivent à se contrôler quelques jours avant l’entrée à l’école ou quelques jours après… La sérénité des parents et la confiance en l’enfant est sans doute ce qui l’aide le plus.

Le rôle de la crèche dans la préparation de l’enfant pour l’école

L’autre grande question des parents porte sur la préparation de l’enfant. En effet, est-il prêt pour aller à l’école ? La crèche a-t-elle fait ce qu’il fallait pour qu’il le soit ?

Oui si l’on considère que la crèche a été pour l’enfant un terrain d’expérience et d’expérimentation qui lui a permis d’explorer le fonctionnement :

De son corps et de ses possibilités physiques, lui permettant de comprendre qu’il est un sujet autonome,

Des autres êtres humains et donc de savoir comment communiquer et se comporter ave eux,

Des objets et donc de comprendre qu’elles sont leurs caractéristiques physiques, les associations possibles et comment les utiliser.

Si la crèche a pu être ce terrain de jeux et d’exploration pour l’enfant, alors l’ensemble de ce qu’il a exploré de façon concrète, en manipulant, en faisant des essais ou tout simplement en bougeant, pourra se réfléchir et s’élaborer plus conceptuellement à l’école. Tenir son crayon, s’aligner sur un espace déterminé, tenir une conversation, ou colorier une forme prévue, autant d’actions qui deviennent faisables à l’école, justement parce que les chemins ont été tracés dans son cerveau, pendant son temps de bébé à la crèche.

C’est en cela que la crèche prépare l’enfant aux apprentissages de l’école, et non en brûlant les étapes. Par exemple, il ne sert à rien de demander à l’enfant de colorier plus tôt pour savoir le faire avant l’école. Car, dans ce cas, il aura loupé la période où il découvre le crayon, où il apprend les caractéristiques de cet objet et où il comprend qu’il peut s’en servir pour faire des traces, des représentations qui restent sur la feuille ! Donc chaque chose se faisant en son temps, la meilleure façon de préparer un enfant pour l’école est celle qui consiste à respecter son développement et ses explorations, avant le temps des consignes à respecter.

Comment l’aider ?

Il s’agit ici de se représenter ce qui se passe dans la tête d’un jeune enfant. Il ne connait pas encore l’école et n’a aucune raison de l’appréhender comme un problème ou une difficulté de passage. Ce sont les adultes qui, le plus souvent, projettent sur lui des aspects positifs ou négatifs liés à un changement de sa vie. L’école n’est en fait qu’un autre lieu de socialisation et d’aventures pour l’enfant, dans lequel il va continuer à faire des apprentissages, expérimenter des mondes encore inconnus et pour cela exercer ses compétences d’observateur, de chercheur et d’acteur. C’est ce qu’il fait depuis sa naissance. Depuis trois ans tout est nouveau pour l’enfant, il ne cesse de découvrir et d’apprendre. Il va continuer à le faire à l’école. Certes il sent bien que quelque chose se prépare mais il n’a aucune raison d’en avoir peur car ce qu’il perçoit de l’école est bien différent de ce que les adultes en attendent. Ses aspirations et ses peurs éventuelles ne sont pas les leurs car sa représentation du monde est différente. Grandir est le propre d’un jeune enfant et il est à même de négocier ce nouveau virage si, de leur côté, les adultes qui l’entourent sont prêts à lui faire confiance et à l’accompagner, sans projeter ou craindre une réussite ou un échec. Aider un enfant qui va à l’école consiste surtout à cesser de nous tourmenter et donc de le tourmenter en ayant peur qu’il ne soit pas prêt ou en lui demandant s’il est content d’y aller, car comment se réjouir de quelque chose que l’on ne connait pas, sauf à comprendre que cela fait plaisir à ses parents ou les angoisse ?

Sans oublier que l’enfant de cet âge vit encore dans le moment présent et ne sait pas se projeter dans un avenir proche ou lointain. Il est donc prudent de ne pas trop l’embêter avec ce qui va se passer dans les mois à venir. Quelques jours avant la rentrée, il sera toujours temps de passer devant l’école et de préparer avec lui ses affaires à emporter dans son sac d’école, le début d’un long rituel scolaire. Pour le jour J, le fait d’avoir encore une fois confiance en lui va l’aider, même s’il pleure parce qu’il ne veut pas quitter ses parents, il a bien le droit d’en être malheureux et de ne pas avoir envie ! Il a besoin de sentir qu’à la fois les adultes acceptent qu’il soit triste et sont en capacité de le rassurer sur la suite. Sans oublier qu’à la sortie, le plus important pour un enfant est la joie de se retrouver et non l’interrogatoire sur sa journée ! En effet, un jeune enfant n’a pas encore la possibilité de comprendre que ses parents ne sont pas dans sa tête de ne savent donc pas déjà tout. Raconter sa journée dont il a déjà oublié les détails n’est donc pas sa priorité et il est préférable de le laisser s’exprimer tout en étant à son écoute. Ce qui l’intéresse est peut-être de s’amuser avec l’adulte à rentrer à la maison en évitant les certains aspects différents du sol, comme les lignes blanches ou les pavés plus foncés…

Cet article a été rédigé par Laurence Rameau.

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