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Laurence Rameau, puéricultrice-formatrice et auteure d’ouvrages sur la petite enfance
Apprendre à gérer ses émotions, apprendre le monde physique et le fonctionnement des humains, voilà ce que font les bébés à la crèche.
Des recherches récentes montrent que la crèche aide mieux les enfants à gérer leurs émotions et leurs relations avec les autres car elle leur permet de construire précocément un comportement pro-social, basé sur l’empathie
[1].
Des chercheurs de l’Inserm, de Sorbonne Université et de l’Université de Bordeaux ont en effet étudié en France l’influence du mode d’accueil dans la petite enfance sur le développement comportemental et émotionnel des enfants.
Les enfants ont été suivis jusqu’à leur 8 ans et les chercheurs ont mesuré régulièrement leurs comportements relationnels et émotionnels. L’étude montre que, comparés aux enfants qui ne fréquentent pas un mode d’accueil collectif, ceux qui ont été accueillis en crèche sont trois fois moins susceptibles d’éprouver ensuite (entre 3 et 8 ans) des problèmes émotionnels ou de rencontrer des difficultés relationnelles.
Peut-on en conclure, peut-être un peu rapidement, que l’accès à un mode d’accueil de type collectif représente une chance pour les enfants, puisqu’il est associé à un meilleur développement psychologique et émotionnel pour la suite ? C’est ce que les parents croient de manière empirique et indiquent généralement lorsqu’ils insistent pour obtenir une place en crèche : « nous souhaitons que notre enfant se socialise à la crèche ». Leur idée est ici de permettre à leur bébé de rencontrer d’autres enfants et d’apprendre avec eux comment se comporter.
Les bébés apprennent principalement en essayant. Ils tentent différentes modalités d’approches et d’établissements de contact avec les autres, ils créent des jeux d’imitation, et poursuivent ensembles des idées communes. A partir des probabilités qu’un comportement ou une réaction se reproduise, ils identifient alors la raison ou la cause les ayant produites. Cela les conduit petit à petit à comprendre comment les êtres humains fonctionnent et comment se comporter avec eux.
Outre le fait que la crèche est le mode d’accueil qui présente le moins de dangers puisque les locaux sont adaptés et que les professionnels sont formés et travaillent en équipe, il est aussi celui qui offre aux enfants une plus grande diversité et opportunité d’apprentissages. C’est ce qui est prouvé aujourd’hui par ces chercheurs sur les comportements pro sociaux, ce que l’on appelle aussi la cognition sociale, c’est-à-dire comprendre comment les êtres humains réagissent et communiquent. Cela pourrait aussi concerner les autres apprentissages : moteurs, langagiers et la compréhension des concepts de base liés aux objets.
Les bébés apprennent à se déplacer et à comprendre les différentes possibilités de leur corps dans l’espace tout en exerçant leurs habiletés manuelles. Installés au sol, ils s’exercent à la mobilité, stimulés par les objets mis à leur disposition, et rassurés par la présence continuelle des professionnels. Leur curiosité innée les pousse à explorer les contrées encore inconnues de la crèche.
Lorsque l’organisation leur permet et que les espaces ludiques sont ouverts, ils sont intrigués par les déplacements des autres enfants et cherchent à les suivre. Ce qui les pousse à se mouvoir et à utiliser leur corps pour franchir les obstacles. Ainsi la crèche est un véritable terrain d’aventures, forcément plus vaste que celui de la maison.
Les bébés apprennent à parler bien avant de prononcer leurs premiers mots. Pendant tout le temps où ils ne parlent pas encore ils apprennent le langage. Ils le font à partir de ce qu’ils perçoivent dans leur environnement, c’est-à-dire non seulement les sons, les mouvements de la bouche et les paroles qui leur sont adressées, mais aussi les interactions langagières où ils s’expriment aussi.
Ils sélectionnent alors les phonèmes, apprennent la syntaxe des phrases et la grammaire. Ils engrangent nombre de mots de vocabulaire. Puis ils essaient les sons et les mots, puis les phrases. La crèche leur donne l’occasion de vivre dans un environnement de langage et d’interactions langagières avec des supports ludiques comme les livres, les marionnettes, les imagiers, les comptines et les chansons.
Les bébés apprennent les caractéristiques physiques des objets et des matières. En les manipulant dans tous les sens et avec tous leurs sens, en les transportant, en les appariant ou en les assemblant, ils en déduisent les grands concepts de solidité, de forme, de taille, de différence, etc. Ils cherchent aussi à comprendre les possibilités de modifications ou de sélections des objets, suivant les actions qu’ils mènent avec eux.
Tous ces apprentissages concrets sont utiles pour préparer le terrain aux futurs savoirs bien plus abstraits et scolaires, comme les mathématiques, la physique ou la conjugaison. Ils font partis des apprentissages fondamentaux de la petite enfance que la crèche propose aux enfants par l’accessibilité aux objets ludiques installés dans les univers de jeux.
Si la crèche est aujourd’hui plus valorisée en tant qu’environnement d’apprentissage pour les tout-petits, c’est aussi parce que les équipes professionnelles orientent leurs objectifs et leurs compétences vers des projets pédagogiques qui visent à favoriser le développement des enfants et pas uniquement à répondre aux mieux à leurs besoins primaires. La valeur ajoutée des crèches est d’ordre éducatif, mais n’est pas pour autant une préparation explicite à l’école ou un conditionnement aux organisations scolaires.
Il convient que les tout-petits apprennent ce qu’il est naturel d’apprendre lorsqu’ils sont des bébés, et cela dans un environnement où les pratiques pédagogiques sont en rapport avec leur âge et leurs capacités d’apprentissage. Par exemple il faut du temps pour comprendre que l’autre souhaite le même objet, et encore plus de temps pour le lui donner. Apprendre à prêter ne se fait ni du jour au lendemain, ni en indiquant juste à l’enfant qu’il doit le faire. Cela se fait lorsque les enfants ont les mêmes objets dans les mains et entrent ainsi en communication par le biais de l’imitation ludique réciproque.
Après cette longue phase, l’enfant apprend que cet objet sert aussi de moyen d’échange et peut en faire des offrandes pour entrer en relation et en jeu avec l’autre. Petit à petit il apprend que le désir de l’autre n’est pas confondu avec le sien et qu’il peut tenir compte de cette différence, c’est ce qu’on nomme la théorie de l’esprit. Il y a tellement d’expériences à faire pour en arriver là ! Les crèches sont des environnements dans lesquels ces nombreuses expériences sont facilitées par les opportunités liées au nombre d’enfants accueillis. Pour autant il ne s’agirait pas d’exiger des enfants des comportements en inadéquation avec leur développement, par exemple leur demander de suivre des règles d’un monde qu’ils ne comprennent pas encore. Il faut pouvoir explorer le monde pour le comprendre.
Connaissant aujourd’hui l’impact positif des crèches aux niveau de l’éducation des jeunes enfants, il convient de mettre en place des pédagogies spécifiques. C’est ce que les crèches Koalakids font en adoptant la pédagogie Itinérance ludique©
[2]
. C’est-à-dire que les équipes mettent en place une organisation dans laquelle les enfants peuvent jouer librement dans des environnements d’apprentissages pensés et adaptés. Elles créent différents univers ludiques qui offrent tous aux enfants des possibilités d’exploration et d’expérimentations au niveau social, moteur, langagier, émotionnel et cognitif.
Dans cette organisation les jeux sont concentrés dans des univers ludiques accompagnés, pour aider les enfants à focaliser leur attention. Les enfants, acteurs et surtout auteurs de leurs jeux, font de nombreux essais positifs et aussi des erreurs qui les conduisent à recommencer pour comprendre comment le monde fonctionne. Ils consolident ainsi petit à petit leurs connaissances, grâce aux adultes qui les sécurisent et soutiennent leur engagement.